Les Peuls et les Toucouleurs ne connaissent pas le pulaar.
Les Flamistes exagèrent. Ils font croire aux autres que tous les Pulaars ont une parfaite connaissance du peul, parce que c’est leur langue maternelle ; un peu comme si tous les Arabes prétendaient être des Al-Khalil ibn Ahmad al-Farahidi ou Sibawayh.
Certes, la langue maternelle est celle que l’enfant comprend avant d’aller à l’école sans efforts et sans intervention pédagogique, mais elle ne lui enseigne pas la lecture et l’écriture, et encore moins, les connaissances livresques. Pour connaître et éventuellement avoir une bonne maîtrise d’une langue, il faut l’étudier, ce qui n’est pas le cas des locuteurs des langues orales qui demandent d’abord d’être codifiées avant de pouvoir passer à la phase suivante, celle de langues d’enseignement.
En Mauritanie seuls quelques rares chercheurs en linguistique et en didactique des langues ayant planché sur l’étude théorique du pulaar comprennent son fonctionnement ; tout le reste des locuteurs du parler peul est encore au niveau du langage, encore très loin de sa bonne maîtrise, car la langue même gestuelle est un système de signes bien élaboré qu’il faut apprendre du moment que la mère ne le transmet pas. Pour illustrer ce propos, l’anecdote suivante nous semble édifiante : lors de la cérémonie funéraire organisée pour rendre un dernier hommage à Nelson Mandala, un jeune homme se présenta au podium à l’improviste, sans être sollicité, afin d’assurer l’interprétation en langage des signes des discours prononcés à cette occasion. Dès ses premiers gestes, les sourds-muets présents comprirent vite que l’homme était incompétent et demandèrent à ce qu’il soit remplacé. Un expert sollicité pour analyser la contre-performance conclut que l’homme était un imposteur, il parlait sans grammaire et répétait des gestes insensés et parfois choquants à l’adresse de l’honorable audience, des insanités du genre : « vous êtes des cons (les chefs d’État et le public) » …
C’est dire en toute simplicité qu’une langue ça s’apprend sinon on n’y connait rien !
Ely Bakar Sneiba