Situation du Covid19 ces dernières 24h en Mauritanie



Boukhary Mohamed Mouemel
Paradoxale que cela puisse paraitre, la sous information et la surinformation relève d’un même combat : la guerre de l’information. La France ne s’en prive pas, notamment en Afrique
Sa presse nous inonde depuis quelques jours par le Congo Hold-up : révélations, interviews, débats… nous cassent les tympans et nous crèvent les yeux, mettant gravement en cause l’avant dernier président de la RDC et son entourage familial. Et ce genre de campagne médiatique, indexant un pays ou un dirigeant africain, n’est pas tout à fait nouveau.
Tout ce qui contribue à altérer l’image de marque du « Continent noir » et ses leaders est généralement bien relayé par la presse française. Malheureusement, nos propres dirigeants y contribuent efficacement en fabriquant la « matière première ». Mais curieusement, leurs complices français et européens présentent moins de visibilité.
Par ailleurs, sous le même angle de discrétion plus ou moins volontaire, les médias français ont tendance à faire profil bas quand il s’agit des couacs ou revers que connait l’intervention militaire française au Sahel. Surtout en ce qui concerne le rejet de cette présence par les populations locales.
Sur ce champ, la France joue la sous information comme stratégie sur le front de la guerre de l’information. La crise du convoi logistique bloqué au Burkina-Faso depuis cinq jours, l’illustre bien. L’évènement est trop peu couvert par la presse française, comparativement au scandale du Congo Hold-up.

Comme quoi, les malheurs des Africains font d’une certaine manière le bonheur des relais et leaders d’opinion français et occidentaux.
Je n’irai pas jusqu’à crier : Quel sadisme, La tentation est toutefois forte
El Boukhary Mohamed Mouemel
J’avais promis, suite à mon retrait des journées de concertation, de revenir sur un certain nombre de choses, notamment sur certaines reformes, les concertations, le sens et les limites mêmes de la démarche du ministre.
Nous y voilà !
Je le fais après lecture et du rapport final de 123 pages de la Commission Nationale des Etats généraux de l’Education et de la synthèse finale des Ateliers régionaux .
D’abord arrêtons-nous un instant sur la réforme de 1999, réforme la plus vicieuse ,la plus inique, la plus anti-nationale de toutes, s’il en fut ! Elle naît dans le contexte du système à filières; filière arabe obligatoire pour tous les enfants arabo-berbères, et filière bilingue où, pour l’essentiel, se retrouvent orientés les écoliers négro-africains. Système à filières concomitante à l’expérience de l’ILN, arrivée presque à terme( 5ème année, devant être généralisée à la 6eme, en raison même de son plein succès- taux de réussite situé entre 70 et 80 % -), et qui remplacerait donc ce système à filières…A un an de l’échéance, voilà qu’on arrête tout, brutalement, et qu’on change d’orientation, contre tout bon sens…Et sans explication aucune!
Pour quelles raisons ou quelle motivation arrête-t-on une expérience satisfaisante à tous points de vue, se demanderont les hommes de bon sens ?
L’explication réside à la fois et dans l’échec patent de la filière arabe qui était dans l’impasse, et dans l’idéologie chauvine : enseignement du hassanya et non de l’arabe littéraire, incompétence des Professeurs des sciences à dispenser correctement les cours dans cette langue, et qui finiront par être relevés et reversés dans la diplomatie, étudiants envoyés à l’extérieur incapables de suivre les cours! Idéologie chauvine-raison principale -qui choisit , à la faveur du traumatisme subie par les négro-africains suite à une répression féroce, de liquider tout legs colonial et d’imprimer le choix d’une Mauritanie arabe, exclusivement, qui passe par l’assimilation du groupe dit minoritaire, conformément à la loi de proximité en sociologie. C’est pourquoi, au lieu de se limiter à corriger les défaillances de la filière arabe par le rétablissement de l’enseignement des matières scientifiques en français-chose normale et légitime-, comme ils le firent, ils décidèrent aussi et surtout de pénaliser, par la même occasion, les enfants pulaar, sooninko et wolofs en dispensant l’enseignement de toutes les matières littéraires en arabe ( Philos, histoire, géographie, langue , morale, instruction civique et religieuse),affectées de coefficients qui défient l’entendement. Pire ils décidèrent de supprimer l’ILN et son expérience à succès, à un an de l’échéance fixée pour sa généralisation et l’officialisation des langues pulaar, sooninke et wolof !
Voilà pourquoi, depuis 1999 c’est l’échec massif en milieu négro africain, dans les examens et concours, conduisant aux abandons massifs de l’école. Cela fait 22 ans que ça dure, les dégâts sont incommensurables… Ceci, l’exposé de la 1ère journée des Concertations nationales, portant sur le diagnostic du système, le passe sous silence…Il fait table rase du succès de l’expérience menée par l’ILN …Le problème d’équité est posé, certes, mais il l’est sous l’angle d’équité du genre et de classes, au sens de P Bourdieu. L’exposé tout comme le rapport final de synthèse tait l’iniquité ou l’inégalité structurelle du système devant l’accès au Savoir entre enfants à la base, beaucoup plus grave ( 2 langues étrangères au sens pédagogique du terme, imposées aux uns au départ du processus d’apprentissage .)
Que retenir à la fois et de ces journées de concertation et du rapport final ?
Dans le libellé des rapports quelque chose frappe tout de suite après lecture : la formulation des conclusions partielles avec l’usage répétitif de termes comme ‘’ la plupart’’ recommandent que, ’’la majorité’’ retient que…Et vu l’absence ,flagrante, d’une juste représentativité des communautés nationales dans le choix des participants, on devine aisément où se situe la ‘’majorité’’ …Mais l’on sait ‘’qu’il n’y a pas de majorité en matière de vérité’’ ; tout comme il n’y a pas de majorité en matière d’identité. Rien n’est plus faux que de croire (ou faire croire)que l’avis majoritaire est forcément le plus juste, le plus bon. C’est un raisonnement spécieux et pernicieux .Il n’y pas de majorité en matière de vérité, encore une fois. Du reste, dans ce genre de conclave c’est le consensus qui doit être requis ou de mise et rien d’autre.
A noter, par ailleurs, le flou sur lequel ‘’surf’’ les rapports concernant le statut des langues négro-africaines; tantôt on parle de ‘’langues d’enseignement’’, tantôt de langues de communication’’ tout court, ou de langues ‘’devant faciliter les apprentissages’’, c’est-à-dire de facilitation pour l’acquisition d’autres langues. Tantôt c’est l’arabe qui est la langue principale d’enseignement, tantôt ce sont toutes les langues qui le sont !!!
‘’Sur la langue d’enseignement, la majorité des participants a insisté sur les langues maternelles comme moyen le plus efficace pour véhiculer les sciences modernes. A cet effet la langue arabe, en tant que langue nationale devrait être la langue d’enseignement des SMT( les sciences ), sans négliger le rôle que pourraient jouer les autres langues nationales dans la promotion de ces matières.’’(fin de citation -page 109).Ca dit ce que ça dit, ambigüité à dessein !
L’ opinion et le bon sens exigent, clairement et sans ambages, que les langues nationales pulaar, soninke et wolof soient des langues officielles et dans lesquelles on enseigne, pour donner les mêmes débouchés que la langue arabe .Toute équivoque doit être levée à ce sujet. Pourquoi le Maroc et l’Algérie , depuis 2002, reconnaissent-ils leur diversité culturelle et officialisent-ils la langue berbère tamazight, et la Mauritanie se cabre ou hésite à le faire pour nos langues ? Au nom de quelle logique ?
…Quelque part dans les rapports, on parle de commencer les langues maternelles dans le pré-scolaire , à la maternelle. C’est une supercherie ! Les classes maternelles existent à peine à Nouakchott où elles sont rarissime, à fortiori à l’intérieur du pays ! Non, il faut reprendre l’expérience de l’Institut là où on l’avait laissée …
Cette réforme, menée tambour battant tombe comme un cheveu dans la soupe , au regard du dialogue en perspective; à moins que …A moins d’indiquer, en sourdine, un rétropédalage dans la volonté politique ‘’d’en haut’’ d’organiser les fameuses ‘’concertations-dialogue’’. Bref , à certains égards et au vu du timing, l’idée de mener cette réforme paraît suspecte !
Toujours dans le rapport final, une sorte de dilemme transparaît dans les termes de choix ; démocratisation de l’enseignement et qualité, ouverture à la modernité et ‘’enracinement dans notre authenticité’’, c’est-à-dire dans nos valeurs traditionnelles islamiques qui , on le sait ,sont adossées au droit musulman lui-même assis sur la charia islamique …du 6ème siècle !
Les auteurs du rapport ne semblent pas prendre conscience du caractère antinomique de ces deux orientations : la charia-source de notre Droit-et l’orientation moderne .La seconde s’oppose à la philosophie socle même de la pensée libre et libérée. Le questionnement philosophique , dit-on , ne présuppose rien sans examen de la raison , alors que le conservatisme réligieux, dogmatique, bride la pensée …Dichotomie ! Ne pas penser est plus dangereux que penser ( pensée critique}, nous dit Anna Arendt .
Alors que nous avons toutes les difficultés du monde à concilier ces termes de choix , les voilà qui parlent d’intégrer le préscolaire, l’enseignement originel , et envisagent la prise en charge des personnes handicapées, ( chose que même les Etats-Unis n’arrivent pas à résoudre). Il faut savoir ce qu’on veut et ce qu’on peut …Qui trop embrasse mal étreint dit le proverbe !
Que penser de la tentative du ministre à mener, en solo, cette réforme ?
J’avoue, pour ma part, être admiratif de la foi ou de l’enthousiasme débordant de ce ministre qui croît possible de mener et réussir, en solo, la réforme du secteur éducatif. Il ne voit pas ou refuse de voir que c’est le ‘’ tout entier’’ qui s’est écroulé…Il ne perçoit pas qu’ ’’il n’y a plus d’Etat depuis la réorganisation judiciaire sous Haidalla des années 80’’,( dixit : Isselmou ould Abdel kader). Chose que confirme amplement Abdallah Sidya Ebnou – grand commis de l’Etat- dans son ouvrage intitulé ‘’quarante ans au service de l’Etat mauritanien’’ – véritable réquisitoire contre les régimes militaires, cause première de cette déliquescence de l’Etat. Ould Ebnou y relate quelques anecdotes , comme la réponse que lui fit, sans gêne , l’agent chargé du bureau des Archives nationales : les documents que vous demandez n’existent pas ! Puis cet administrateur qui jette les archives dans la cour pour faire de la place ; à noter que d’autres les brûlent… Le Ministre ne semble pas prendre conscience de l’ampleur des dégâts mais surtout du désordre, pour ne pas dire de l’anarchie générale qui règne partout dans ce pays ; de la circulation routière et urbaine au plus haut sommet de l’administration ; et ce, pourtant, jusques dans son propre secteur -l’Education elle-même- ! En effet , combien d’Enseignants flottent sans rien faire ,alors que les besoins sont là ? combien sont détachés pendant que des écoles en manquent et qu’on parle d’en recruter 6000 ?
Combien sont dans leurs boutiques et continuent à émarger ? et ceux-là, censés être dans les classes , combien sont assidus ? Combien de faux diplômes à la fonction publique qu’on n’ose pas nettoyer, pour ne pas fâcher X ou Y ou tel électorat ? Je pourrai répéter ce tableau, à loisir, dans le secteur de la santé, de l’administration générale, de la Justice , des sociétés d’Etat, de l’Armée, partout …Dans ses propres bureaux du ministère où je me suis aventuré , par accident , lors de notre rendez-vous privé ,je suis tombé sur deux dames qui dormaient , à points fermés, sur le plancher ! Et ceci , on ne le rencontre pas qu’au ministère de l’Education seulement … La corruption gangrènne tout , jusqu’aux bureaux des Examens et Concours …Il n’y a plus de suivi rigoureux du personnel, et la multiplication des Inspecteurs jusques dans les départements est une fausse solution.
Bref, le mal est général et profond, au point qu’il est utopique de songer à redresser un secteur isolé. Pour réussir le redressement il eût fallu que, dans un vaste mouvement d’ensemble impulsé d’en haut, tout se redressât en même temps .Ce n’est pas hélas le cas pour l’instant. Dans le secteur de l’Education, comme dans celui de l’administration générale, nous avons besoin, pour nous relever, de l’aide de la coopération internationale et d’un retour de la vieille génération au moins pour une tutelle deux ans ! les dégâts sont énormes et le mauvais pli pris, profond…
Maintenant que dire des solutions , des bonnes solutions ?
Elles doivent, à mon sens, toutes- si toutefois le vivre-ensemble demeure le cap-, reposer sur le constat que nous sommes un assemblage de peuples , agrégés par la seule volonté du colon. Nous ne sommes pas encore une nation , que l’on cherche à forger par l’assimilation forcée. Nous appartenons à deux espaces géographiques, deux aires culturelles différentes, deux entités politiques historiques distinctes, deux récits nationaux , deux peuples, en un mot, aux traditions et habitudes mentales différentes .
Toutes solutions imaginées, pour être viables et durables, doivent découler de cette réalité têtue de notre Diversité et Identité plurielle.
Par dessus tout, une question essentielle – presque existentielle- qui précède toutes les autres, demeure: voulons -nous réellement changer ?
That’s is the question !
21 Novembre 2021
Samba Thiam

Cliquez sur le lien ci-dessous :
http://cnc.gov.mr/VisAvis.aspx?ID=191AV0

Boukhary Mohamed Mouemel
« Le rugby connaît un nouvel ordre mondial et, pour l’instant, les All Blacks ne sont pas à la hauteur », écrit Marc Hinton, expliquant la terrible déroute de l’équipe de son pays, battue par la France (40-25)
Très intéressé par les questions géostratégiques, notamment les problèmes de sécurité au Sahel, la phrase se transforma rapidement à mes yeux. A la place des mots « le rugby » et « All Blacks », ce sont les termes « la lutte contre le terrorisme » et « les Français » qui me viennent désormais à l’esprit, quand je pense au papier du commentateur sportif néozélandais et au blocage depuis trois jours d’un convoi militaire français au Burkina-Faso.

Une victoire qui arrive à point nommé !
J’avoue qui si j’étais un français, quel qu’il soit, haut responsable ou citoyen « lambda », je n’aurais probablement pas la même réaction. Malgré la concomitance des deux évènements, il est inimaginable que j’établisse un lien entre notre belle et éclatante victoire inattendue contre les rugbymans néozélandais hier au Stade de France, avec le blocage d’un convoi de ravitaillement militaire se déplaçant à des milliers de km du pays. La Presse française a fait de même. Elle s’est intéressé énormément au match de rugby, consacrant assez peu d’espace à l’évènement politico-militaire, malgré- (ou à cause)- de sa gravité.
« Pourquoi gâcher la fête ! Savourons plutôt la victoire, au lieu d’écouter des hordes de jeunes burkinabés en colère. », devait-on se dire en France. C’est à cela que sert le sport : il vous fait oublier les soucis et peines. Si K. Marx était de ce monde aujourd’hui, il ferait son autocritique : « le sport est l’opium des peuples », écrira-t-il.
La victoire du « Quinze de France » est venue à point nommé. Elle a ravi la vedette à l’humiliation militaire qu’ont fait subir des citoyens désarmés, du « Pays des hommes intègres », à la gigantesque armada logistique française.
Un bonheur de courte durée!
Mais, le bonheur risque d’être de courte durée, par ailleurs. L’enlisement des forces françaises au Sahel a atteint son apogée. ⁰Outre les résultats militaires controversés de leur engament sur le terrain, le blocage du convoi par les populations civiles met sérieusement à mal leur soutien logistique à partir de la Côte d’Ivoire, compromettant gravement la planification opérationnelle contre les groupes terroristes.
Or, les « abc » de la connaissance militaire et stratégique nous enseignent que « si la logistique dit non, (…). Il faut changer le plan d’opération. Il est mauvais », comme disait Eisenhower. Seulement, des solutions de rechange, logistiques et opérationnelles, susceptibles d’améliorer le dispositif sur le terrain, il n’y en a pas beaucoup.
Pire : l’incident pourrait faire tache d’huile. Il risque de s’étendre. La MINUSMA et les autres forces étrangères au Sahel n’y sont pas l’abri. Egalement, en plus de la Côte d’Ivoire, les pays de la région ayant des façades maritimes, Ghana, Togo, Bénin… feront certainement preuve davantage de prudence quant à l’usage de leurs infrastructures portuaires par des forces militaires étrangères.
Accélération de la « restructuration », et poids pressant de l’échéance présidentielle
Le bourbier sahélien devenant de plus en plus insoutenable pour la France, l’occupant de l’Elysée ne risque-t-il pas de revoir la « transformation stratégique » de son dispositif militaire, qu’il avait annoncée le 10 juin dernier, et que « Barkhane » a entamée aussitôt après ?
Dans cette perspective, une accélération du rythme de la « restructuration » est envisageable, tout comme une réduction encore plus importante du format des forces françaises déployées dans la région.
A quelques mois de l’élection présidentielle, Macron fera tout son possible afin que le bourbier sahélien ne pèse pas trop dans sa stratégie de candidat à sa propre succession. Cherchera-t-il, à faire incomber la responsabilité des échecs et limites de l’action militaire aux chefs d’Etats des pays sahéliens ?
C’est trop facile comme alibi. Mais la tentation semble forte chez le Président français, estimant que ce genre de discours ne manquera pas d’avoir des échos favorables parmi les électeurs français. Il n’hésitera pas trop, soutenu par son ministre des affaires étrangères, de puiser des arguments dans l’instabilité politique dans la région. Les difficultés liées aux transitions, particulièrement au Mali, et la colère de la rue au Burkina-Faso, risquent d’être « instrumentalisées » via des circuits « indétectables » que sécrètent la nouvelle « Françafrique », version Macron.
El Boukhary Mohamed Mouemel