par Webmaster | 8 11 21 | Actualitès, Economie, Environnement, Politique, Sociétés, Tribunes
La Confédération Africaine des Organisations Professionnelles de la Pêche Artisanale (CAOPA) a organisé en octobre dernier, un webinaire auquel j’ai eu le plaisir de participer en tant que journaliste mauritanienne.L’objectif en était d’élargir la réflexion autour de pratiques inquiétantes fragilisant la sécurité alimentaire de la majorité des pays côtiers, et menaçant dans les pays en développement concernés l’emploi de plus de 100 millions de travailleurs dont près de 32 millions d’acteurs du sous-secteur de la pêche artisanale (voir ce rapport 2019 de Greenpeace : le poisson détourné).
Durant ce webinaire un large éventail de questions a pu être formulé et discuté, – dont certaines relevant directement de la situation en Mauritanie : Comment concilier un développement durable du secteur de la pêche avec les objectifs commerciaux des acteurs exogènes ? Comment sortir de la situation actuelle, entre les accords de pêche et les usines de farines et d’huiles de poisson ? Qui vend le poisson aux usines de farines? La ressource appartient-elle aux communautés qui la vendent ou à ceux qui l’acquièrent pour la transformer ? Comment doter la Commission Sous Régionale des Pêches (CSRP) d’un mandat de « gestion partagée » de la ressource, à même d’en améliorer la durabilité ? Quid de la gestion des risques associés aux prospections en cours et à l’exploitation prochaine du gaz et du pétrole ? Comment ramener l’avis scientifique au cœur des décisions politiques ? Comment soutenir les médias dans leur mission d’information et de mobilisation autour des enjeux majeurs, rattachés à ces questions ? …
Production de farines de poisson : une industrie toujours plus prédatrice
Autrefois artisanale, la production de farines de poisson a démarré au début du 20ème siècle autour d’une belle idée : celle de recycler les déchets de poissons. Malheureusement, elle s’est progressivement transformée en activité industrielle menée à bord de navires-usines, avant de venir s’arrimer directement au niveau des ports de pêche.
Les poissons ciblés sont les petits pélagiques, poissons gras se rassemblant en grands bancs en Afrique de l’Ouest, et notamment trois espèces surexploitées selon les dernières évaluations de l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO): sardinelle ronde, sardinelle plate, et ethmalose d’Afrique. Outre que ces poissons sont un maillon clé d’une extraordinaire chaine de biodiversité, ils constituent dans la sous-région la principale source de revenus des communautés locales de pêche, tout en leur apportant une protéine très accessible. L’impact écologique de l’industrie comprend par ailleurs des niveaux substantiels de prises accessoires par les chalutiers approvisionnant les usines, contribuant significativement à la dégradation du milieu marin.
Cette situation inquiète vivement la communauté scientifique, ainsi que les organisations de professionnels de pêche. Alertés par la famine qui frappe actuellement près de 2 millions de malgaches, victimes du pillage de leurs ressources halieutiques couplé à une sécheresse aigue, les acteurs multiplient les appels au gouvernement pour une gestion plus durable, plus rigoureuse et plus transparente du secteur. Voir ici l’appel d’un expert halieute : https://mobile.facebook.com/story.php?story_fbid=2981612972079799&id=100006933762840&sfnsn=mo&_rdc=1&_rdr.
Mauritanie : un modus operandi alarmant
En Mauritanie, la situation qui est tout aussi alarmante que partout ailleurs, est devenue critique avec l’essor des usines de production d’huiles et de farines de poisson dans le pays : 42 implantées, dont 38 en activité. Et si on imaginait que la quarantaine d’usines de farine de poisson tournaient à plein régime, combien de millions de tonnes de petits pélagiques seraient détournés, chaque année, des assiettes des populations africaines ?
Les usines de production de farine de poissons ont commencé leurs activités vers la fin des années 2000, après avoir été chassées d’un peu partout dans le monde (dont le Maroc, le Sénégal, la Gambie…), accusées d’avoir épuisé les stocks de poissons jadis abondants, détruit les écosystèmes locaux, contaminé l’environnement et paralysé le tourisme à travers les pollutions suscitées.
Communément appelées Mocca, ces usines se sont d’abord appuyées pour leur approvisionnement sur les femmes mareyeuses organisées en coopératives, en leur octroyant des crédits qui pouvaient aller jusqu’à 100.000 MRO. Ce crédit leur servait à racheter le poisson auprès des pêcheurs artisanaux, qu’elles revendaient en exclusivité aux unités industrielles en question, comme le témoigne cette mareyeuse interviewée en 2016.
Puis, à partir de 2010, les entreprises chinoises ont fait l’objet d’accords pour le moins complaisants avec le gouvernement mauritanien, les autorisant à établir des activités de pêche et à construire des usines de transformation de poisson. Selon les accords passés avec Poly Hong dong par exemple, l’entreprise pouvait transformer 100 000 tonnes de poisson par an sans préciser avec quelles espèces de poisson.
En 2017, une autre entreprise chinoise, la Sunrise Oceanic Resources Exploitation Company, installe une usine de transformation de farine de poisson dont la taille est 3 à 4 fois celle de Poly Hong Dong, apportant avec elle sa propre flotte de pêche.
À partir de 2015, des navires turcs à senne coulissante commencent à leur tour à opérer dans le pays, approvisionnant les usines de fabrication de farine de poisson appartenant à des entreprises turques. Cette flotte turque, forte de près de 100 navires industriels opérant dans la zone côtière, s’est rapidement élargie pour approvisionner d’autres usines, dont des entreprises chinoises et même la Fédération mauritanienne des usiniers.
En d’autres termes, sous l’influence du lobby des industries, la politique du gouvernement détruit l’équilibre historique de l’exploitation de la ressource halieutique par la Mauritanie et ses voisins, privilégiant l’approvisionnement des filières d’élevage d’Asie (de crustacés, poulets et, comble symbolique pour un pays musulman, de porcins !), au détriment de l’approvisionnement de la population locale et régionale en poisson destiné à la consommation.
Le Parc national du Banc d’Arguin (PNBA) sous le feu :
Le Banc d’Arguin est un écosystème marin d’importance mondiale pour la conservation, le plus grand sanctuaire d’oiseaux d’Afrique de l’Ouest, soutenu par l’un des plus vastes herbiers du monde composé de trois espèces d’algues, deux tempérées près de leur limite sud et une tropicale à sa limite nord.
Un groupe d’experts prévoit, dans un article scientifique publié fin octobre 2021, le déclin probable de la superficie totale de cet écosystème d’herbiers marins selon des scénarios de changement climatique au cours du 21e siècle, qui utilisent des modèles de distribution des espèces et des estimations de l’élévation du niveau de la mer.
Ce qui laisse présager un effondrement des principales fonctions de l’écosystème du PNBA, avec des répercussions profondes sur la biodiversité, les ressources halieutiques et les services écosystémiques – si la tendance globale climatique n’est pas rapidement inversée.
Par ailleurs, dans un contexte économique difficile et après des années d’exploitation intense des stocks de poissons, les pressions pour une ouverture du domaine maritime du PNBA à la pêche artisanale motorisée sont fortes. Les richesses exceptionnelles de la plus importance aire maritime protégée d’Afrique, attirent les convoitises des opérateurs de la pêche.
Pris dans une logique de court terme, ces derniers échouent à percevoir l’importance de préserver son intégrité́ non seulement pour des raisons écologiques évidentes, mais aussi pour le rôle économique qu’il assure dans le renouvellement des ressources halieutiques de la ZEE mauritanienne.
Fait gravissime, la fédération mauritanienne des usiniers a même réussi à obtenir, en juillet 2021, une dérogation spéciale pour avoir accès à une zone interdite à la pêche industrielle, mettant en péril l’intégrité du PNBA. Sous prétexte d’expérimentation pilote, cette dérogation autorise un senneur de 40 mètre à venir pêcher directement contre la frontière du Parc, ce qui accentue fortement les risques d’incursions volontaires ou accidentelles à l’intérieur de l’aire marine protégée.
On se demande aujourd’hui, si les échouages récurrents de poissons et notamment l’échouage de plus de 50 espèces de poissons en juin dernier entre le Cap Tafarit et le Cap Tagarit, au cœur du PNBA, ne sont pas l’œuvre de l’un de ces mastodontes qui convoitent les richesses du Parc.
Mesures urgentes :
La surexploitation des ressources halieutiques menant à leur épuisement (y compris du fait de l’évolution des techniques de pêche employées), l’augmentation rapide du détournement des captures de la consommation humaine vers la production de farines et d’huiles de poisson destinées à l’exportation, est contraire à un certain nombre de devoirs et d’engagements de nos gouvernements, y compris ceux pris dans le cadre des instruments internationaux de gestion des pêches, ainsi que les grands engagements internationaux tels que les Objectifs de Développement Durable des Nations unies.
Il s’agit de réduire l’intensité́ de la pêche dans la région en vue de la ramener à des niveaux durables pour l’environnement, tout en assurant qu’elle réponde adéquatement aux besoins des populations locales pour leurs moyens de subsistance et leur sécurité́ alimentaire.
Le gouvernement mauritanien, sensé pratiquer une gestion de la rareté des ressources halieutiques par une approche de précaution, est invité conformément au Code des Pêches, à prendre ses responsabilités, à assurer plus fortement sa mission de régulation, et à déclarer l’état de crise conformément aux avis scientifiques.
Il devrait négocier avec l’ensemble des acteurs de la mer, nationaux comme internationaux, et particulièrement avec les opérateurs de la pêche, un système économique plus tenable, plus durable, avec des taux de rendement et des retours sur investissement plus raisonnables.
De telles actions ont déjà̀ été́ réclamées à de nombreuses reprises par les experts scientifiques nationaux et internationaux, par les fédérations socio-professionnelles de la pêche, par les fédérations nationales de la pêche artisanale, ainsi que par les partenaires techniques et financiers de la Mauritanie. Elles doivent à présent se traduire par des mesures concrètes, telles que :
– La réduction des usines de production de farines de poisson à un maximum de 2 usines par État acceptant encore de les abriter sur son territoire.
– L’interdiction de toute pêche industrielle pendant au moins 6 mois de l’année, et ce jusqu’à reconstitution totale des stocks de poisson.
– La mise en place – à l’instar de la grande muraille verte du Sahel – d’une « Grande muraille bleue » couvrant la totalité de la côte atlantique du globe, reliant l’ensemble des aires marines protégées de la zone. Cette grande muraille bleue se fera autour de la protection des petits pélagiques qui ont la grande capacité de freiner la désoxygénation des océans et servira de rempart contre l’effondrement des principales fonctions d’un écosystème déjà bien impacté par les changements climatiques.
Le coût de toutes ces mesures pourrait être supporté par la communauté internationale dans le cadre de l’adaptation aux Changements Climatiques, notamment par les mécanismes de financement du Fonds Vert pour le Climat.
Maimouna SALECK
par Webmaster | 4 11 21 | Politique, Sociétés, Tribunes

Le salut de toutes nos communautés, de toutes nos communautés, réside dans le respect de l’application de la justice, de l’égalité et là le seul auteur ne peut être que
l’état garant des droits gages de notre unité
Aucune composante nationale n’a et ne peut s’autoriser ou s’autoproclamer d’une suprématie quelconque sur les autres, dans aucun domaine, encore moins de la couleur.
L’unité nationale, l’égalité et l’équité doivent être l’objectif de l’etat: il doit veiller aux respects de ces principes entre nos composantes, entre les citoyens, dans tous ses actes et dans toutes ses décisions .
Il faudra que chacun se rende compte de l’évidence, la Mauritanie d’aujourd’hui n’est ni divisible ni partageable ni séparable.
Il n’existe pas une région, une circonscription, une municipalité ni même une bourgade d’une seule race, d’une seule communauté ou d’une seule ethnie.
Il est donc du devoir de tous les patriotes de ce pays de s’unir pour barrer la route à tous les pyromanes ou fossoyeurs de la maison commune d’où qu’ils sont et à quels niveaux qu’ils soient.
Nous devons lutter ensemble pour mettre fin à toutes formes et mesures discriminatoires, à tout acte qui divise nos communautés nationales.
La Mauritanie fait face aujourd’hui plus que jamais à de graves menaces aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de nos frontières, nos divisions internes pourraient être fatales à notre pays: à chacun de prendre ses responsabilités.
Qu’Allah protège notre pays.
Baba Marega Assa
par Webmaster | 12 10 21 | Actualitès, Focus, Politique, Sociétés

Ahmed Salem Deida
Violé, pillé, agressé, précarisé, paupérisé,
clochardisé, humilié par sa classe politique, par son élite, le peuple mauritanien est incapable de mener le véritable combat qu’il doit et devait mener depuis longtemps: son unité, sa cohésion sociale qui entravent son développement.
Tous nos intellectuels se cachent derrière un clavier à la maison ou dans un bureau poussiéreux pour faire preuve de courage, loin, très loin des arènes, le bon peuple croit à tout ce que l’on lui dit.
Depuis 1978, les diffrents régimes dictatoriaux ont fait de ce peuple ce qu’il est aujourd’hui: misère, souffrance, humiliations , pauvreté. Ne sommes-nous pas les vrais artisans de notre propre déboire?
Apres 60ans d’indépendance n’est-il pas temps qu’un leader, un groupe leader émerge pour bousculer, pour réveiller ce peuple à lutter pour ses droits individuels, collectifs et dire enfin son mot dans la construction de sa patrie!
Tous les régimes ont utilisé la même arme pour soumettre ce peuple: la division intercommunautaire, le bâton et la carotte tout en développant la culture de la médiocrité.
Premier pas d’un éveil populaire serait sans doute la prise de conscience par nos différentes composantes que l’injustice, la discrimination sont les armes du système politique et non telle ou telle communauté.
Au sommet de la pyramide un groupe manipule la base à sa guise et selon l’intérêt de l’heure.
La solution ne viendrait que d’une action volontariste et d’une sensibilisation généralisée qui exige souvent une certaine dose de sacrifice: seule une Mauritanie élevée sur les piliers de la justice, de la bonne gouvernance et de la Fraternité, fera la fierté de ses citoyens.
Ahmed Salem Deida
par Webmaster | 9 10 21 | Actualitès, Focus, Sociétés

Chapeau
Le papier et le carton font partie des déchets ménagers souvent récupérés en Mauritanie, pour servir d’emballage alimentaire ou d’aliments de bétails. On peut voir, devant quasi toutes les écoles à Nouakchott, les vendeuses emballer les beignets, sandwiches, ou cacahuètes, qu’elles vendent aux enfants, dans du papier journal souvent récupéré des poubelles des ministères ou des entreprises.
Aux alentours des marchés de la capitale, existe un marché florissant de cartons en papier, qui découpés en petits morceaux, finissent dans la gamelle de la plupart des animaux domestiques élevés en milieu urbain sur tout le territoire national.
Ce sont pourtant des pratiques fortement déconseillées par les experts de la santé publique, à cause des produits chimiques utilisés pour fabriquer le papier, mais aussi à cause de l’encre et de la colle contenu dans le carton.
Le Professeur de chimie, Mohamed Baba explique que : «pour appréhender le danger du carton sur la santé animale et humaine, il faudrait comprendre le procédé kraft qui réduit le bois en carton. Ce procédé utilise de la soude et du sulfure de sodium pour dissoudre la lignine contenue dans le bois. On obtient ainsi de la cellulose sous forme de pâte noire, qui doit passer ensuite par plusieurs solutions chimiques complexes qui vont la blanchir, la raidir, la coucher et la rendre perméable à l’encre. Tout un processus toxique qui rend le carton impropre à toute consommation alimentaire. »
Interpellée par cette situation alarmante, Mme Aïssata DIA, éducatrice, a décidé d’utiliser l’éco-vannerie du papier pour alerter et sensibiliser autour de cette pratique dangereuse.
L’idée de recyclage du papier :

Native de la ville de Sélibaby, au Sud de la Mauritanie, Aïssata est familière avec la transformation et la valorisation des produits naturels pratiquées par toutes les femmes de la communauté. Autour d’elle, elle voyait les femmes transformer la paille pour fabriquer des objets utilitaires et d’artisanat comme les nattes, cabas, chapeau, corbeilles … une activité qui générait des revenus aux familles et qui est aujourd’hui en voie de disparition à cause de la rareté de la ressource.
En effet, les faibles pluviométries des années de sécheresses récurrentes ont diminué la quantité des terres cultivables, qui sont désormais réservées aux cultures vivrières. Puis, la paille a, été petit à petit, remplacée par le plastique souple des emballages avant son interdiction dans le pays.
En cherchant donc une idée pour recycler le papier, Aïssata découvre l’éco-vannerie sur internet et décide de faire d’une pierre deux coups : trouver une alternative à la paille et au plastique pour la vannerie traditionnelle et sensibiliser autour du papier recyclé.
« J’ai commencé à recycler le papier en 2017 pour créer des objets de décoration et de rangement », raconte-t-elle «une technique que j’ai apprise grâce aux tutoriels sur l’éco-vannerie. C’est une jeune discipline qui se propose de concilier modernité et savoirs ancestraux, en adaptant à des matériaux de récupération (comme le papier) les techniques de vannerie traditionnelle. »

« Je recycle tous les types de papier, même ceux que l’industrie classique n’arrive pas à recycler, comme les papiers cadeaux, le papier en rouleau, papier photo, essuie-tout ou le papier peint» continue d’expliquer cette jeune maman passionnée. «Grâce à ce papier travaillé, je crée des objets d’artisanat, utilitaires ou de rangement : nattes, paniers, corbeilles, plateaux, casiers de rangement, … Toutes mes créations sont écologiques, car j’utilise pour lier en plus de la colle, la gomme arabique et pour colorer, des teintures végétales, comme le thé, le bissap, les épluchures d’oignons, les pétales de fleurs,… »
Les œuvres d’Aïssata Dia, ont connu un grand succès lors du dernier Grand Marché de Noël de l’Institut Français de Mauritanie. Cependant pour que l’activité devienne rentable, elle aurait besoin de recruter une main d’œuvre qualifiée pour la seconder.
En attendant, l’artiste s’adonne à son activité favorite – celle d’animer des ateliers d’éco-vannerie, avec les petits et les grands, en leur expliquant les avantages de la préservation de l’environnement.
Maimouna Saleck